Une double exposition d’oeuvres du cinéaste Bennett Miller s’est tenue au sein des galeries Gagosian et Paris Cinéma Club. Intégralement généré à l’aide de l’intelligence artificielle, le travail du réalisateur entend interroger nos préjugés sur cette technologie et son rapport à la créativité.
On avait laissé Bennett Miller en 2014 avec le très bon Foxcatcher ; qui contait l’histoire vraie des frères Schultz, champions olympiques de lutte, claquemurés par le gourou Steve Carrell, méconnaissable dans ce huit clos oppressant. De Bennett Miller, on avait connu les excellents Le Stratège et Capote. Depuis, le réalisateur new-yorkais s’était éclipsé pour ne réapparaitre que dix ans plus tard, associé à un projet de documentaire sur l’intelligence artificielle (inédit en France).
En ce début 2025, la tenue de ces deux expositions, et la retrospective à laquelle il a été convié, nous en dévoile un peu plus.
Tout d’abord, Bennett Miller a profité de son documentaire pour se spécialiser en conception d’oeuvres générées par l’IA (aidé notamment par l’entreprise Midjourney et son outil Dall.E dont il fut l’un des premiers utilisateurs).
On sait par ailleurs que cette collaboration lui a permis de concevoir une série de photographies qui fait aujourd’hui l’objet de cette mise en lumière par Gagosian (une galerie d’art, si ce n’est LA galerie d’art la plus cotée au monde).
On retient que le documentaire, inédit pour le moment en France, est structuré autour d’une série d’interviews de personnalités très diverses, parmi lesquelles Henry Kissinger (ancien Secrétaire d’Etat de Richard Nixon), Sam Altman (directeur général d’OpenAI), le Dalaï Lama et Reid Hoffman (homme d’affaires et capital-risqueur américain) ; documentaires et recherches qui feront l’objet d’un prochain film, au cinéma celui-ci.
La série photographique quant à elle, côté cour, nous en apprend plus sur le réalisateurs et ses obsessions ; toujours en recherche d’innovation, il est régulièrement sollicité par le secteur de la tech ; on ne compte plus ses interventions auprès de Figma, Adobe, ChatGPT, Midjourney.

Côté rue, l’exposition compte une dizaine de photographies, sépia, vieillies, dont les sujets oscillent entre photos anciennes, notamment trois portraits pouvant avoir été pris au début du siècle dernier, ou à Pearl Harbor, et abstractions surréalistes que n’auraient nullement renié David Lynch.

En ressort une interrogation, celle d’un artiste face à un nouvel outil : où se situe la créativité à l’heure du digital, et donc de l’intelligence artificielle ? La réponse se trouve dans la place que saura prendre et se dégager l’artiste face à la technologie : comme dominant, créatif, ou dominé ; copieur, suiveur, automate privé d’instinct. Restent la narration des prompts rapportés à la construction du récit. L’artiste comme un chef d’orchestre. Brillant.